Nous quittons Tokyo sous la pluie. Direction les montagnes pour deux jours de repos. Tokyo est une ville fascinante mais ce n’est pas une ville reposante. Partout du monde, du mouvement, de la foule. Partout des néons, des enseignes, des gens qui distribuent (poliment) des tracts. Partout du bruit, du trafic, de la musique mais aussi des escalors qui parlent (attention à la marche, attention à la marche, attention à la marche…) ou des restaurants qui, pour attirer le chaland, amplifient dans la rue l’ambiance de l’intérieur. Ici tout est grand, les immeubles sont immenses, les gares sont gigantesques, les centres commerciaux démesurés. Du coup, on marche beaucoup et on a peu l’occasion de s’arrêter, hormis pour avaler un udon. Tokyo n’est pas une ville de flânerie, de terrasses ou de petits cafés. Pour trouver un espace où bouquiner avec une boisson chaude autre que du thé vert, il faut dénicher un café français ou se réfugier chez l’omniprésent Starbucks Coffee ; ce que nous fimes hier pour échapper à la pluie avant d’aller dire sayonara à Tokyo dans un bon restaurant.

Je profite de cette journée de transport pour faire un petit apparté culinaire. On pourrait trop rapidement réduire la gastronomie japonaise aux sushis et au riz. Ce serait ignorer la variété incroyable et la qualité de ce que l’on mange ici. Petit panorama de nos expériences culinaires.

Je vous ai déjà parlé des plats traditionnels que l’on nous a servis au ryokan, qui sont à la cuisine japonaise ce que les escargots de Bourgogne sont à la cuisine française : indiscutablement traditionnels, très appréciés des amateurs mais parfois difficiles à avaler pour les néophytes. Passons.

Le quotidien est bien plus comestible. Poulet, porc ou poisson, pané ou en omelette, servi sur un bol de riz, udon (grosses nouilles dans un bouillon avec de la viande et des légumes) et yakitori (brochettes) sont servis partout, dans des gargottes et des petits restos. Dans les restos les plus cheap, le menu est remplacé par une machine. On tape le numéro de son plat préalablement répéré sur les modèles en vitrine (voir photos sur le blog), on met les sous dans la machine et on récupère un ticket que l’on n’a plus qu’à tendre au cuisto pour qu’il prépare le plat. Très bon et très pratique quand on ne parle pas le japonais.

Le salaryman (employé de bureau japonais) pressé préfère souvent acheter une “bento box” en bas de sa tour. Cette petite boite en carton ou en plastique contient un repas entier. On en trouve de toutes sortes, du simple plat accompagné de riz à l’assortiment de petits plats raffinés. Dans les gares, les voyageurs ont un choix pléthorique de bentos, toutes plus appétissantes les unes que les autres. Vers midi, tous les voyageurs – nous y compris – sortent leur bento. Et pour ceux qui ont oublié de l’acheter avant de monter dans le train, le ‘chef express’ local passe dans les wagons avec un petit assortiment.

Si on veut améliorer l’ordinaire, il y a également l’embarras du choix. Chaque resto à sa spécialité : viandes grillées, fondue japonaise, tempura (friture), etc. Sans compter les spécialités étrangères, à commencer par les françaises. Hier soir, on est passé voir la carte de Joël Robuchon, qui n’avait pas l’air mal. Mais comme on n’a pas fait autant de kilomètres pour manger du foie gras, on a fini dans un tepanyaki qui nous a servi 9 plats dont un bœuf grillé fondant à tomber par terre.

Ici, il y a un vrai culte de la bonne cuisine qui se double d’une culture du perfectionnisme et du raffinement. Les sous-sols des grands magasins en sont le reflet le plus éclatant. Intégralement dédiés à la bonne bouffe, on y croise les plats préparés et les desserts les plus raffinés. De quoi faire passer Lafayette Gourmet pour un franprix de banlieue est ! Tous les grands noms français sont là : Fauchon, Kaiser, Ladurée, Robuchon, et même certains noms que l’on ne connait pas : Boul’Mich, ‘Vie de France’… Évidemment, il y a quelques adaptations locales : brioche à la patate douce chez Fauchon ou pain au beaujolais chez Kaiser…

Mais le comble du luxe, ce ne sont pas les spécialités françaises, ce sont les fruits ! Le marchand de fruit ressemble a une parfumerie. Dans sa vitrine épurée, trônent quelques fruits somptueusement emballés dans des boites moltonnées. Le prix de la grappe de raisins dans son écrin ? 10 000 yens. 100 euros pour une (belle) grappe de raisins ! Si c’est un peu cher, vous pouvez toujours vous rabattre sur un lot de trois pommes à 40 euros. J’ai mis la photo sur le blog tellement c’est invraisemblable.

Suite au prochain numéro. Bon appétit.



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